De celle qui ne nageait pas par peur de couler

Cela fait très longtemps que je dois poster un nouvel article. Pour être plus exacte, cela fait presque un mois que je dois REDIGER un nouvel article. J’ai pas mal d’idées en réserve : certaines qu’on m’a soufflées, d’autres faciles à écrire, d’autres encore qui pourraient ne prendre que très peu de temps… Pourtant je n’ai pas réussi à me lancer. Je me suis rendu compte que quand j’écris, cela vient comme une sorte d’inspiration et d’élan : ça y est je suis prête, c’est le moment… Et ce moment ne venait pas. Pourquoi ? Parce que le thème qui me magne le plus, celui sur lequel il est évident que je dois écrire, eh bien ce thème-là, il est trop difficile ! Il fait mal ! Je ne sais ni comment le tourner, ni comment l’aborder. En plus il va me mettre terriblement à nue. Mais c’est lui auquel je dois me confronter, je le sais. J’ai ressenti les premières contractions, je crois que le moment est venu… (j'espère que tu aimes les métaphores parce que sinon tu vas frôler l'overdose! Bon courage !)

Vois-tu, depuis septembre dernier, je n’exerce plus mon métier d’enseignante. Je suis en congé parental, qui s’achèvera dans quelques jours, aux 3 ans de mon tout petit bébé, et à partir de là je serai en disponibilité. Durant toute l’année scolaire dernière, avec une amie, j’ai travaillé sur un projet qui m’a tellement portée, en lequel je croyais tant, que j’ai saisi l’opportunité de faire une parenthèse dans ma « carrière » de prof pour mener cette idée le plus loin possible. 

Il faut que tu saches deux choses : la première c’est que je n’ai réalisé qu’il y a peu de temps que j’étais dans un processus de « reconversion professionnelle ». Cela peut paraître complètement stupide, mais l’idée ne m’avait pas effleurée. Je voyais plutôt ça comme un virage, un prolongement de mon métier d’origine. Ces ateliers, cet espace que je souhaitais créer pour venir en aide aux familles, aux enfants, et même aux profs souffrant d’un mal-être vis-à-vis de l’école, je les voyais comme un petit truc en plus qui allait s’additionner au reste de ma vie professionnelle. Tu dois te demander comment il est possible qu’à aucun moment je n’aie compris que ça n’avait rien à voir avec mon métier, que ce n’était même pas vraiment compatible en fait !

 

Eh bien je crois tout simplement que c’était une façon de me rassurer : « mais non tu ne pars pas vers l’inconnu ! Tu fais la même chose… en un peu différent ! » (si peu !) ; « mais non tu ne prends pas de risque ! Dans le pire des cas tu reprendras ta vie exactement comme avant ! »

Cet article possède même une bande son! Ne crois-tu pas que ça vaut le coup d'attendre

vraiment vraiment longtemps pour obtenir au final une qualité de prestation pareille ?! 😁😉

Sauf que voilà, il s’est passé un truc horrible : j’ai réalisé qu’il était absolument impossible pour moi de reprendre ma vie comme avant ! Je ne déteste pas mon métier loin de là ! J’aime faire des cours : les réfléchir, les inventer ; j’aime la relation avec les élèves ; j’aime ce one-woman-show permanent quand tu es dans ta salle de classe… Oui mais… il y a trop de mais ! Et je me rends compte que je suis prisonnière de cet entre-deux qui n’en est plus un : j’ai quitté et je ne peux plus revenir. Ma seule solution c’est de réussir à faire autre chose, je n’ai plus de retour au plan A. 

 

 

 

C’est là que tu dois savoir la deuxième chose. Oh presque rien, un détail : je suis tétanisée par la peur.

 

 

Depuis tous ces mois, je reçois souvent des témoignages d’admiration de la part de personnes qui félicitent cette prise de risque… On me dit que c’est super d’avoir eu ce cran, que j’ai eu beaucoup de courage de me lancer… et moi je ne peux pas y croire. Dans un premier temps parce que je ne pense pas avoir fait preuve de courage : on m’a offert l’inestimable cadeau de pouvoir juste arrêter. Dans un deuxième temps parce que je n’ai encore rien fait. 

Oh bien sûr, je ne passe pas mes journées à glander dans le canapé en mangeant des chips (tu savais toi que rien n’est plus polluant que l’emballage d’un paquet de chips ? A part les Pom’potes peut-être… C’est dommage, j’adore les chips !). Au contraire je trouve même que j’ai encore moins de temps qu’avant. Mais la vérité c’est que je ne fais pas ce que je devrais faire si je voulais réussir. Je ne me confronte pas assez à la difficulté, je ne mets pas assez régulièrement en place toutes les belles théories LEAN etc. Et tu sais pourquoi ?

Parce que je n’ai pas commencé à nager, par peur de couler !

"Saute, elle est bonne!"
"Saute, elle est bonne!"

Vois-tu, c’est la métaphore que j’ai fini par trouver pour illustrer ma situation : je suis comme quelqu’un qui s’est jeté dans la piscine, mais qui n’a pas encore commencé à nager. Oui j’ai fait le premier pas, j’ai pris mon élan et je n’ai pas eu peur de sauter dans l’eau. C’est ce qui semble si impressionnant aux yeux des gens, et pourtant ce n’était pas ça le plus difficile. Le plus difficile, c’est faire ce que tu dois faire une fois que tu es dans le grand bain. Moi, je n’ai pas commencé à nager. Tout au plus j’ai fait la planche, me laissant plus ou moins porter par l’eau. En réalité je me suis plutôt laissée couler, un peu trop même ! 

Alors évidemment si je file la métaphore, il y a quand même un côté super positif : une piscine a toujours un fond, et une fois que tu l’as touché, tu ne peux que remonter.

Mais de faire cela je n’ai pas encore eu le courage. Je suis passée par une phase très difficile en cette fin d’hiver, où mes yeux pleuraient tout seuls. J’étais épuisée, physiquement, moralement, sans énergie et sans courage. Et maintenant que ça va mieux, je tente de petits mouvements en direction de la surface de l’eau, mais je ne nage toujours pas !

Et c’est là le truc le plus débile dans cette histoire ! Tu sais pourquoi je ne nage pas ? Parce que j’ai peur de couler (de me noyer même ?). Or peux-tu me dire ce qui se passe quand tu ne nages pas ? Eh bien tu coules ! Et tu te noies !! Je pense sérieusement envoyer cette idée d’illustration au Petit Larousse pour la définition du mot « paradoxe » !

Et même si je compte écrire un prochain article sur la peur de l’échec, je crois que mon souci est un tout petit peu ailleurs. Evidemment, que j’ai peur d’échouer ! Mais en vérité ce qui me fait le plus peur c’est de me rendre compte que le courant m’a emmenée beaucoup plus loin que ce que je croyais, et que je ne vois plus la rive (oui, bon, je sais : trop de métaphores… j’arrête promis !). Je disais donc que maintenant je suis allée trop loin : je dois changer de métier, et je ne sais pas comment trouver le courage de créer celui dont je rêve.

Tu as remarqué ? J’ai triché ! Cet article n’est pas fini ! J’ai effleuré le sujet sans complètement l’aborder : il reste cette fichue peur de l’échec ! La prochaine fois… En attendant, dis-moi ce que tu penses de tout ça et si toi aussi tu as sauté dans la piscine ! 

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Commentaires: 7
  • #1

    Caro (mardi, 16 avril 2019 00:21)

    Le plus dur dans la vie c'est de faire des choix. Le changement c'est difficile au début, compliqué au milieu, exaltant à la fin. Tu as le courage d'être actrice de ta vie, continue, fonce. Nous on croit en toi. Tu es brillante, généreuse et drôle, le cocktail parfait de la réussite ;-)))

  • #2

    Mitch Buchannon (mardi, 16 avril 2019 08:15)

    Some people stand in darkness afraid to step into the light. You’re not that kind of person. Don't you worry, it's going to be all right. There´s a C.J. Parker deep inside of you. Swim, Super Angé ! Swim !

  • #3

    Florance Hiha (mardi, 16 avril 2019 12:16)

    Bravo Angé ! Un très bel article qui nous parle à tous. En plus, il y a même de la musique maintenant. Au-delà du texte de la chanson, j’ai beaucoup apprécié le caractère country du morceau (même si je regrette un peu le mélange avec les nouvelles musiques électroniques).

  • #4

    Tina T. (mardi, 16 avril 2019 12:18)

    Super Angé, you’re simply the best.

  • #5

    Mano Doulort (mercredi, 17 avril 2019 10:57)

    Je sais qu’il y a plus d’une championne en toi. Et si tu veux pas foncer tout de suite (genre papillon ou crawl), je te conseille la nage indienne. Double avantage.1) Tu surprendras tous tes adversaires. 2) Tu pourras me voir sur le rebord pour t’encourager.

  • #6

    Daffy D. (vendredi, 19 avril 2019 00:10)

    Admirable d’être dans la piscine... moi, quand je regarde cette étendue bleue, je me sens comme... un canard... un canard sur le World Trade Center. Si tu vois ce que je veux dire.

  • #7

    Index Ibayamama (samedi, 20 avril 2019 10:12)

    « Papatuanoko t’a donné deux bras et deux jambes, alors n’attends pas que les canards du World Trade Center se posent sur ta tête : nage ! »
    (proverbe polynésien)